Corse-Matin du 9 mars 2021
Calvi
Speloncatu innove en se dotant d’une base d’adresses locales
J.-F.P.
Jean-François Poli, maire du village et Pierre Ridolfi, conseiller municipal. PHOTOS J.-F.P.
Un compteur à relever, un secours à assurer, un colis à livrer, un dépannage à effectuer : autant de taches qui nécessitent de localiser avec précision une habitation ou la boîte à lettres qui y est rattachée. Or, dans les communes de moins de 2 000 habitants, l’adressage selon les normes nationales est fortement conseillé mais pas obligatoire.
Maire de Speloncatu depuis 1995 et cadre chez l’opérateur Orange, Jean-François Poli est confronté quasi quotidiennement à des problèmes d’adressage. En tant qu’élu, pour les besoins de ses administrés, et en tant que chargé des relations avec les collectivités, notamment pour le déploiement de la fibre, il lui semblait urgent de trouver une solution. Pour Speloncatu, c’est désormais chose faite.
« Lors d’une réunion avec Corsica Fibra, le délégataire de la CdC pour le déploiement de la fibre dans l’île, ses représentants nous ont expliqué qu’un piquetage GPS de chaque habitation serait idéal pour pouvoir les raccorder, explique le maire. Ils nous parlaient d’un adressage officiel avec des rues et des numéros de rue, ce qui n’existe pratiquement pas dans les villages. Un opérateur, pour fournir la fibre, aura besoin d’un nom de voie, d’un numéro et d’un éventuel point GPS. »
L’arrivée prochaine de la fibre dans le village aura été un déclic, un déclencheur. Pierre Ridolfi, conseiller municipal et président de l’association Imaginà coworking, a longuement travaillé sur la question. Puisque la fibre nécessite un adressage officiel et normé, et que la compétence est celle de la commune, autant bien faire les choses.
« Nous avions déjà travaillé sur la toponymie de Speloncatu, se souvient Pierre Ridolfi. Nous avons rendu aux différents quartiers leur nom d’origine : à Cima, e Calanche, u Corsu, u Stradò di Calvi etc. Sans adressage officiel, dans les villages, chacun pouvait nommer sa rue, son immeuble, sa villa comme il le souhaite. Il a aussi fallu se renseigner pour savoir si chaque habitation est individuelle ou collective ou encore combien de boîte à lettres se trouve à la même adresse. Je ne vous parle même pas des homonymes, nombreux dans nos villages, qu’il faut différencier… »
470 adresses créées
Une fois la nomination des voies validée par le conseil municipal, ce dernier peut saisir sa base d’adresses locales directement sur le site adresse.data. gouv.fr. Les démarches de chacun des administrés s’en trouvent grandement facilitées.
« Notre commune a désormais la maîtrise totale de son adressage, se félicite Jean-François Poli. Aucune adresse supplémentaire ne pourra être créée. Notre base d’adresses locales, avec les coordonnées GPS de chaque habitation, sera communiquée aux services compétents. L’anonymat des gens sera garanti puisque seule la commune saura qui habite où. À présent, la prochaine étape sera d’apposer des plaques et des numéros dans les rues. »
La base de Speloncatu comprend 470 adresses auxquelles ont accès les services de secours, les fournisseurs d’accès à internet, l’administration fiscale, etc.
« À défaut de base d’adresses locales, il existe une base d’adresses nationales qui se compose de sept sources, reprend Pierre Ridolfi. Il y a le cadastre, les télécoms, l’Insee, l’IGN, la Poste, les pompiers et le guichet d’adresses. Une base d’adresses locales efface toutes ces sources-là, il n’y en a plus qu’une seule qui persiste, la base d’adresses locales, gérée par la commune. »
« Il vaut mieux avoir réalisé son adressage avant le déploiement de la fibre. Cependant, avec les sources croisées, on y arriverait quand même, concède le cadre chez Orange. Mais cette base d’adresses locales a d’autres intérêts. Sur notre plan de sauvegarde communale, par exemple, cela permet de répertorier nos administrés de plus de 75 ans. Tout ce travail, nous l’avons fait en régie et il ne nous a donc quasiment rien coûté. Mais il me semble que des financements existent, à travers le Comité de massif. »
Sur le site gouvernemental adresse.data.gouv.fr, le coworking de Speloncatu apparaît comme l’un des huit partenaires nationaux de cette nouvelle formule d’adressage. 2 807 communes, partout sur le territoire, ont déjà franchi le pas. Sur l’île, Speloncatu est la première. Les autres communes de Corse savent désormais vers qui se tourner.
Une base d’adresses locales géolocalisées permet aux pompiers, aux fournisseurs d’eau, d’électricité et d’internet, ou encore aux facteurs, de ne plus faire d’erreur. Speloncatu, première commune à franchir le pas sur l’île.